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Nuit du jeudi 24 au vendredi 25 décembre 2020 – Nuit de Noël – messe des familles

Je crie de joie à l’ombre de tes ailes !

Isaïe 9,1-6 – Psaume 95,1-3.11-13 – Tite 2,11-14 – Luc 2,1-14

vendredi 25 décembre 2020, par Marc Lambret

« Je crie de joie à l’ombre de tes ailes ! » (Ps 6 2,8) : le psalmiste se compare donc ici à un poussin. Y en a-t-il dans la crèche ? Non. Le sujet serait trop petit pour un santon. Pourtant, ce serait joli : comme des étoiles descendues en flottant se poser près du petit Jésus. Comme des flocons de lumière venus du ciel pour rejoindre le Roi fait enfant. Mais c’est trop petit.

Pourtant, ce serait bien d’en attribuer un à chaque enfant à la maison : chaque soir, ayant été sage, il avancerait vers la crèche. Sinon, il reculerait… quoique, le matin, étrangement, il aurait retrouvé sa place. Mais vous le faites déjà, n’est-ce pas, avec des moutons toutefois.

Des moutons, oui, bien sûr, il y en a dans la crèche. Dans la Bible aussi, il y a beaucoup de moutons : les brebis d’Israël qui suivent leur berger (il y a aussi des bergers dans la crèche), des agneaux que le pasteur prend dans ses bras. Mais souvent il est question de fidèles qui veulent se réfugier à l’abri des ailes du Seigneur. D’ailleurs, Dieu dit à Israël, au livre du Deutéronome : « Je t’ai porté comme sur les ailes du grand aigle ». C’est majestueux, un aigle, plus qu’une poule. Mais, dans la crèche, on voit plus souvent une poule qu’un aigle.

Au fait, se trouve-t-il une poule dans l’Écriture ? Oui, une fois, dans l’évangile. Je ne parle pas du coq ; nous le verrons tout à l’heure, celui-là. Mais, tant en Matthieu qu’en Luc, Jésus dit un jour : « Jérusalem, Jérusalem, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes… » Ainsi, il se compare lui-même à une mère-poule.

Mais pour l’instant, il est plutôt dans la situation du poussin : du tout-petit qui a encore besoin d’être un peu couvé. Pour un enfant, c’est un refuge très nécessaire que les bras de sa maman ; ou de son papa, d’ailleurs, qu’il soit papa-poule ou pas ! Le Fils de Dieu, lui qui est Seigneur, s’est fait enfant, en grand besoin de protection. Cette crèche est son premier abri, au premier jour de sa vie, dans la nuit. Bientôt, il y aura l’Égypte, son refuge contre le roi impie décidé à supprimer sa vie toute neuve.

Le mot « refuge » est apparenté à « fuite » - et l’on parle bien de « la fuite en Égypte ». Serait-ce indigne du Fils de Dieu fait homme, de fuir ? Mais les aventuriers les plus courageux savent bien qu’il faut parfois reculer devant le danger et trouver un abri : en mer, en montagne, dans le désert, aux prises avec l’ennemi. Jésus connaîtra tout cela : le désert, la montagne, la mer et les batailles ! Parfois, il s’enfuira et se cachera pour échapper à ceux qui lui voudront du mal. Et, à la fin, il n’y aura plus de refuge pour lui : les siens l’abandonneront, le premier d’entre eux le reniera avant le chant du coq (le voilà, le coq !) Rien n’arrêtera la violence jusqu’à ce que le Juste soit supplicié, mort et enterré.

Lui qui était si bien de toute éternité auprès du Père, dans la condition de Dieu tout puissant et invulnérable, il a pris jusqu’au bout notre chair de faiblesse, de souffrance et de mort. Mais c’est ainsi qu’il a sauvé le monde et qu’il peut maintenant se donner dans l’Eucharistie en nourriture de vie éternelle : la mangeoire en est la prophétie.

Par son mystère pascal, Jésus s’est fait le refuge de l’humanité, la vraie Arche du Salut. Il a donné sa vie pour que nous ayons des ailes sous lesquelles nous rassembler et crier de joie, pour que nous puissions à notre tour devenir grands et nous faire le refuge de nos frères éprouvés.

Pourtant, nous ne perdons pas l’enfance en accédant à la force de l’adulte, puis en avançant dans le grand âge. De cœur, nous restons tous des tout-petits. Noël nous le rappelle pour notre joie à tous, car c’est la fête de tous les enfants que nous sommes toujours devant Dieu et devant nos frères si nous aimons Jésus comme il nous a aimés.

Dès maintenant et pour toujours, nous pouvons crier de joie avec l’Enfant Jésus, le Verbe fait chair, le Fils éternel et notre frère, à l’ombre des ailes de notre Père bien-aimé.